Grand Claus et petit Clauspage 6 / 10
- Ma foi, j'en ai assez de traîner cette sotte caisse, elle est lourde comme si elle était pleine de pierres. Je m'en vais la jeter à l'eau, si elle surnage, je la repêcherai bien quand elle passera devant ma maison, si elle va au fond, la perte ne sera pas grande. Et il empoigna le coffre, et commença à le soulever, comme s'il voulait le placer sur le parapet et le précipiter dans la rivière.
- Non ! non ! pitié ! s'écria le sacristain, laisse-moi sortir auparavant.
- Ouh ! ouh ! dit petit Claus, comme s'il avait bien peur. Le diable est resté enfermé dedans. C'est maintenant que je vais certainement le lancer à l'eau pour qu'il se noie et que le monde en soit débarrassé.
- Au nom du ciel, non, non ! hurla le sacristain. Je te donnerai un plein boisseau d'écus, si tu me laisses sortir.
- Cela, c'est une autre chanson, dit Claus. Et il ouvrit la caisse. Le sacristain, bien que tout courbaturé, s'élança dehors, et saisissant le coffre il le jeta à la rivière, et poussa un profond soupir de soulagement. Puis il mena Claus dans sa maison et lui remit un boisseau rempli d'argent, Claus le chargea sur sa charrette à côté de l'autre, puis il rentra chez lui. Je n'aurais jamais rêvé que mon cheval me rapporterait une telle somme, se dit-il lorsqu'il eut mis en un tas par terre toutes les belles pièces qu'il avait gagnées. Comme grand Claus sera vexé quand il saura qu'au lieu de me faire du tort, c'est à lui que je dois d'être devenu riche ! Cependant je ne veux pas lui conter l'affaire directement, prenons un biais pour la lui apprendre. Il envoya un gamin emprunter un boisseau chez grand Claus. "Que peut-il bien avoir à mesurer ? " se dit ce dernier, et il enduisit de poix le fond du boisseau, pour qu'il y restât attaché quelque parcelle de ce qu'on allait y mettre. Et en effet, lorsqu'on lui rapporta le boisseau, il trouva au fond trois shillings d'argent tout flambant neufs.
- Qu'est-ce cela ? se dit grand Claus, et il courut aussitôt chez petit Claus.