La malle volantepage 1 / 6
Il était une fois un marchand, si riche qu'il eût pu paver toute la rue et presque une petite ruelle encore en pièces d'argent, mais il ne le faisait pas. Il savait employer autrement sa fortune et s'il dépensait un skilling, c'est qu'il savait gagner un daler. Voilà quelle sorte du marchand c'était - et puis, il mourut.
Son fils hérita de tout cet argent et il mena joyeuse vie; il allait chaque nuit au bal masqué, confectionnait des cerfs-volants avec des riksdalers de papier, et faisait des ricochets sur la mer avec des pièces d'or à la place de pierres plates. A ce train, l'argent filait vite... A la fin, le garçon ne possédait plus que quatre shillings et ses seuls vêtements étaient une paire de pantoufles et une vieille robe de chambre.
Ses amis l'abandonnèrent puisqu'il ne pouvait plus se promener avec eux dans la rue.
Mais l'un d'entre eux, qui était bon, lui envoya une vieille malle en lui disant: Fais tes paquets!
C'était vite dit, il n'avait rien à mettre dans la malle. Alors, il s'y mit lui-même.
Quelle drôle de malle! si on appuyait sur la serrure, elle pouvait voler.
C'est ce qu'elle fit, et pfut! elle s'envola avec lui à travers la cheminée, très haut, au-dessus des nuages, de plus en plus loin. Le fond craquait, notre homme craignait qu'il ne se brise en morceaux, il aurait fait une belle culbute! Grand Dieu! ... et puis, il arriva au pays des Turcs.
Il cacha la malle dans la forêt, sous des feuilles sèches et entra tel qu'il était, dans la ville, ce qu'il pouvait bien se permettre puisque, en Turquie, tout le monde se promène en robe de chambre et en pantoufles.
Il rencontra une nourrice avec un petit enfant.
- Ecoute un peu, nourrice turque, dit-il, qu'est-ce que c'est que ce grand château près de la ville ? Les fenêtres en sont si hautes !
- C'est là qu'habite la fille du roi, répondit-elle. Il lui a été prédit qu'elle serait très malheureuse par le fait d'un fiancé, c'est pourquoi personne ne doit aller chez elle sans que le roi et la reine soient présents.