Le singepage 4 / 4
A la fin, pourtant, l'idée que les enfants n'ont rien pour manger lui tient lieu de courage. Elle entre. Mais, à peine le seuil franchi, un immense éclat de rire l'arrête court. «Valentin, v'là le singe !....» Elle est bien laide, en effet, avec ses loques qui ruissellent de pluie, toutes les pâleurs de l'attente et de la fatigue sur les joues.
«Valentin, v'là le singe !» Tremblante, interdite, la pauvre femme reste sans bouger. Lui, s'est levé, furieux. Comment ! elle a osé venir le chercher là, l'humilier devant les camarades ?... Attends, attends... tu vas voir !.... Et terrible, le poing fermé, Valentin s'élance. La malheureuse se sauve en courant, au milieu des huées. Il franchit la porte derrière elle, fait deux bonds et la rattrape au tournant de la rue... Tout est noir, personne ne passe. Ah ! pauvre singe !...
Eh bien ! non. Loin des camarades, l'ouvrier parisien n'est pas méchant. Une fois en face d'elle, le voilà faible, soumis, presque repentant. Maintenant ils s'en vont tous deux bras dessus bras dessous, et, pendant qu'ils s'éloignent, c'est la voix de la femme qu'on entend s'élever dans la nuit, furieuse, plaintive, enrouée de larmes. Le singe prend sa revanche.