Le Roi Bec-de-grivepage 3 / 5
Mais la princesse ne savait rien à la façon d'allumer un feu, de faire la cuisine et le mendiant dut tout faire lui-même. Quand ils eurent achevé leur maigre repas, ils se couchèrent. Mais le lendemain la pauvre fut tirée du lit dès l'aube, car elle devait s'occuper de la maison.
Quelques jours se passèrent ainsi, tant bien que mal, et bientôt, ils n'eurent plus rien pour se nourrir.
- Femme, dit le mendiant, nous ne pouvons pas continuer ainsi à manger sans travailler.
Il sortit couper de l'osier qu'il lui apporta. Elle se mit à ployer l'osier, mais comme les brins étaient durs, ses mains fragiles s'y blessèrent.
- Je vois cela ne va pas, dit le mari, tu vas plutôt filer, peut-être en seras tu capable.
Elle s'assit et essaya de filer ; mais le fil rugueux eut tôt fait de blesser ses doigts tendres et le sang se mit à couler.
- Tu n'es vraiment bonne à rien ! dit l'homme, me voilà bien avec un femme comme toi ! C'est bon, on va essayer un commerce de poteries : des pots, des cruches et autres ustensiles de cette sorte. Tu iras au marché et tu les vendras.
- Hélas, pensa aussitôt la malheureuse, si jamais des gens du royaume de mon père viennent au marché et m'y voient en train de vendre, comme ils vont se moquer de moi !
Mais à quoi bon se plaindre ? il fallu bien qu'elle s'exécutât, si elle ne voulait pas mourir de faim. La première fois, cela se passa bien : les gens achetaient volontiers à cette femme, parce qu'elle était jolie, et ils payaient le prix qu'elle leur demandait. Il y en eut même qui la payèrent et lui laissèrent ses poteries.
Ils vécurent de ce profit tant que dura la marchandise, puis son mari lui fournit de nouvelles poteries. Elle retourna s'asseoir dans un coin du marché avec ses pots et ses écuelles, et se remit à faire des affaires. C'est alors que soudain un hussard ivre arriva en plein dans les poteries qu'il brisa en mille morceaux. La malheureuse se mit à pleurer, ne sachant plus que faire.