Grand Claus et petit Clauspage 1 / 10
Dans un village vivaient deux paysans qui portaient le même nom. Ils s'appelaient tous deux Claus, mais l'un avait quatre chevaux, l'autre n'en avait qu'un. Pour les distinguer l'un de l'autre, on avait nommé le premier grand Claus, bien qu'ils fussent de même taille, et le second, qui ne possédait qu'un cheval, petit Claus. Écoutez bien maintenant ce qui leur arriva, car c'est une histoire véritable, s'il en fut jamais. Toute la semaine le petit Claus travaillait pour le grand à la charrue avec son unique cheval, en retour, grand Claus venait l'aider avec ses quatre bêtes, mais une fois la semaine seulement, le dimanche. Houpa ! comme petit Claus faisait alors claquer son fouet pour exciter ses cinq chevaux, car ce jour-là il les regardait tous comme siens. Un dimanche qu'il faisait le plus beau soleil, les cloches sonnaient à toute volée, et une foule de gens, parés et endimanchés, leur livre de prières sous le bras, se rendaient à l'église, lorsqu'ils passaient à côté du champ où petit Claus conduisait la charrue avec les cinq chevaux, dans sa joie et pour faire parade d'un si bel attelage, il faisait le plus de bruit qu'il pouvait avec son fouet et s'écriait à tue-tête :
- Hue ! en avant tous mes chevaux !
- Qu'est-ce que tu dis donc là ? interrompit grand Claus, tu sais bien qu'un seul de ces chevaux t'appartient. Lorsqu'il vint encore à passer du monde, petit Claus oublia la remontrance et s'écria de nouveau :
- Hue ! en avant tous mes chevaux !
- Je te prie de cesser, dit grand Claus. Si cela t'arrive encore une fois, je donnerai un tel coup sur la tête de ton cheval, que je l'assommerai. Alors tu n'auras plus de cheval du tout.
- Sois tranquille, cela ne m'arrivera plus, répondit petit Claus. Il vint à passer un riche paysan, qui lui fit de la tête un signe amical, petit Claus se sentit très flatté, il pensa que cela lui serait beaucoup d'honneur que ce paysan pût croire qu'il possédait les cinq chevaux attelés à sa charrue. Il fit de nouveau claquer son fouet en criant encore plus fort que les autres fois :