Le goulot de la bouteillepage 5 / 5
- Non, vois-tu, disait la vieille fille, je ne veux pas que tu dépenses un écu pour la couronne de mariage de ta fille. C'est moi qui t'en donnerai une magnifique. Regarde comme mon myrte est beau et bien fleuri. Il provient d'une bouture de celui que tu m'as donné le lendemain de mes fiançailles et qui devait un an après me fournir une couronne pour mon mariage. Mais ce jour n'est jamais arrivé ! Les yeux qui devaient être mon phare dans la vie se sont fermés sans que je les aie revus. Il repose au fond de la mer, le cher compagnon de ma jeunesse. Le myrte devint vieux, moi je devins vieille et, lorsqu'il se dessécha, je pris la dernière branche verte et la mis dans la terre, elle prospéra et poussa à merveille. Enfin ton myrte aura servi à couronner une fiancée, ce sera ta fille. La pauvre vieille avait les larmes dans les yeux en évoquant ces souvenirs, elle parla du jeune capitaine, des joyeuses fiançailles dans le bois. Bien des pensées surgirent dans son esprit, mais pas celle-ci, c'est qu'elle avait là devant sa fenêtre un témoin de son bonheur de jadis, le goulot qui fit retentir un schouap si sonore lorsqu'on le déboucha dans le bois pour boire en l'honneur des fiancés. Le goulot de son côté ne la reconnut pas, il n'avait plus écouté ce qu'on disait, depuis qu'il avait remarqué qu'on ne s'extasiait pas sur ses étonnantes aventures et sa récente chute du haut du ciel.