Monsieur Pointupage 2 / 4
On bâtissait une maison neuve en face de chez lui; de sa fenêtre il surveillait les travaux. » Ils emploient du sable ronge qui ne séchera pas, s'écriait-il; on ne se portera jamais bien dans cette maison-là ; voyez comme les maçons posent leurs pierres de travers ! Le mortier ne vaut rien; c'est du gravier, non du sable, qu'il faut.
Je vivrai assez pour voir cette maison-là tomber sur la tête de ses habitants ! » Il faisait par là-dessus deux points à son ouvrage; mais tout à coup il se levait encore et ôtait précipitamment son tablier de cuir en disant: « Il faut absolument que j'aille leur dire leur fait. » Il tombait sur les charpentiers : « Qu'est-ce que cela veut dire? rien n'est d'aplomb dans votre charpente ; est-ce que vous croyez que ces solives-là tiendront? tout se détraquera d'un moment à l'autre. »
Il a pris une hache entre les mains d'un charpentier et veut lui montrer comment on doit s'y prendre, quand une voiture chargée de terre glaise vient à passer; il jette là la hache pour courir après le charretier : « Êtes-vous fou? lui crie-t-il ; y a-t-il du bon sens d'atteler de jeunes chevaux à une voiture surchargée comme celle-ci? Les pauvres bêtes vont crever sur la place ! » Le charretier ne lui répond pas; M. Pointu rentre tout en colère dans sa boutique.
Comme il va se rasseoir, son apprenti lui présente un soulier. « Qu'est-ce encore que cela? lui crie-t-il; ne t'ai-je pas défendu de découper les souliers si bas? Qui est-ce qui achètera une pareille chaussure? ce n'est plus qu'une semelle! J'entends que mes ordres soient exécutes à la lettre.
— Monsieur, répond l'apprenti, vous avez raison, sans doute; ce soulier ne vaut rien; mais c'est celui que vous venez de tailler et de coudre vous-même. Vous l'avez fait tomber tout à l'heure en vous levant, et je n'y ai touché que pour le ramasser; mais un ange du ciel ne parviendrait pas à vous satisfaire. »