J'aime l'odeur de la classe, j'aime beaucoup mon voisin, j'espère qu'il pense comme moi, que nous sommes bons copains, aujourd'hui il y a plus de garçons que de filles, à nous la grande cour, on pourra jouer aux billes ! La cloche vient de sonner, vite en rang deux par deux, bousculé de partout, je perds de vue Cécile, mon papa dit souvent que l'école est un jeu, où gagne celui qui sait que dix fois cent font mille. La maîtresse est heureuse, elle fait les traits en jaune, existe-t-il des craies de toutes les couleurs ? je sais placer la Seine, j'ai du mal pour le Rhône, le redoublant y arrive, cela me fait peur. Une nuit j'ai rêvé d'une dictée à l'envers, pour me corriger il fallait deux stylos verts, je regarde au dehors, il pleut sur les jonquilles, je déteste le préau, on n'y sort pas les billes. On dit que pour passer en classe supérieure, aucune matière ne peut-être négligée, l'Histoire à mon avis mériterait bien plus d'heures, ainsi chaque élève aurait la sienne à livrer. Mardi la belle Cécile m'a fait un sourire rare, je venais de sauver un insecte qui pique, « il faut être méritant pour connaître la gloire », merci m'sieur l'directeur pour cette phrase poétique. Il est onze heures sur l'horloge, la leçon de français va sortir de nos têtes durant de longues minutes, le temps pourrait gâcher la fête, la récrée, j'entonne pour le soleil un morceau à la flûte. Cette semaine j'ai appris : les multiplications, à attendre pour manger que chacun soit servi, qu'il fallait être fort pour battre Napoléon, et plein de choses encore pour commencer sa vie. Un rayon au tableau nous illumine et brille, la maîtresse disparaît et semble contente pour nous, tant pis si c'est pas sec, on mouillera nos genoux, j'entends déjà au loin le roulement de ma bille.