Le Roi Bec-de-grivepage 1 / 5
Un roi avait une fille qui était extraordinairement belle, mais aussi tellement fière et prétentieuse qu'aucun fiancé ne lui semblait jamais bon pour elle. Elle les rejetait tous, l'un après l'autre, et par dessus le marché, elle se moquait d'eux.
Un jour, le roi fit préparer un grand festin auquel il invita tous ceux qui avaient envie de se marier. Tous furent placés sur un rang suivant leur position : d'abord venaient les rois, ensuite les ducs, les princes, les comtes, les chevaliers, enfin les gentilshommes. La fille du roi fut amenée devant tous, mais à chacun elle trouvait un défaut. Celui-là elle le trouvait trop gros : un tonneau de vin ! disait-elle ; celui-ci était trop grand : long et maigrichon, un cornichon ; un autre était trop petit : petit et rond comme un melon ! Cet autre était trop pâle : blanc comme la Mort ! Un autre elle le jugeait trop rouge : un vrai coq ! Le sixième n'était pas assez droit : du bois vert qui a séché au four ! disait-elle. A chacun elle trouvait une moquerie à faire.
Mais c'est surtout un bon roi qui excita ses railleries : placé au début du rang, il avait le menton qui remontait un peu. Ho, quel menton s'esclaffa-t-elle. On dirait un bec de grive ! Et ce roi, depuis ce moment, fut appelé Bec-de-grive.
Quand il vit que sa fille ne savait que se moquer des autres, et qu'elle ignorait tous les soupirants qu'il avait rassemblés. Le vieux roi se mit en colère et jura qu'elle aurait comme époux le premier mendiant qui viendrait quémander.
Quelques jours plus tard, un musicien vint chanter sous les fenêtres pour recevoir quelque obole. Dès que le roi l'entendit, il donna l'ordre qu'on le fit monter. L'homme entra, tout en guenilles et haillons, chanta devant le roi et sa fille, et quand il eut terminé, il demanda une aumône.
- Ta chanson m'a tellement plu, dit le roi, que je veux te donner ma fille en mariage.
Comme la princesse s'effrayait, le roi reprit :